Poutès va avoir un nouveau barrage, plus écologique et plus respectueux des poissons migrateurs

Poutès va avoir un nouveau barrage, plus écologique et plus respectueux des poissons migrateurs

En cette Semaine du développement durable, le cas du barrage de Poutès, en Haute-Loire, est exemplaire. Après avoir suscité de vives oppositions, il est reconstruit autour d’un bon compromis et un concept original proposé par EDF.

Construit en 1941, le lourd barrage hydraulique de Poutès, sur l’Allier, soulevait de gros problèmes environnementaux. Avec sa hauteur de retenue de 17 m et son lac en amont de 3,5 km de longueur, il a profondément modifié le cours de cette rivière, freinant les mouvements des sédiments et empêchant la circulation des poissons migrateurs. Le plus emblématique d’entre eux est le saumon atlantique, mais d’autres espèces – anguilles, aloses, lamproies… – ont elles aussi déserté le Haut Allier.

Comme l’explique l’Onema (Office national de l’eau et des milieux aquatiques), même si un ascenseur à poissons avait été installé, le barrage était un gros obstacle pour la « montaison » des saumons, c’est-à-dire leur remontée de la rivière, rendant difficile pour eux l’accès à 60 % des frayères. Quant aux larves, elles ont tendance à se perdre dans le lac de 3,5 km lors de leur « dévalaison », et sont trop retardées dans leur début de migration.

Cependant, la production électrique générée par ce barrage, et par celui de la vallée de l’Ance du Sud (les deux alimentant l’usine de Monistrol), est indispensable à la région. Les débats ont duré longtemps. Comment concilier cette activité avec le maintien, voire la restauration d’une rivière dans son état naturel ? Accepté en 2011, le projet, innovant, d’un barrage tout à fait original a été accepté par toutes les parties, impliquant la destruction de l’ouvrage actuel (on dit « effacement ») et les travaux peuvent désormais débuter.

Le nouveau barrage atteindra 85 % de la production précédente

Bien plus petit, le nouveau barrage fera passer la différence de hauteur d’eau de 17 m à 4 m. En amont, la retenue ne sera plus que de 350 m. De part et d’autre de l’installation, des passages permettront la montaison des poissons et la dévalaison des larves, qui, adultes, devront rejoindre la mer de Norvège ou le sud du Groenland. Depuis plusieurs années, des observations ont été réalisées avec des scientifiques et les associations locales pour optimiser ces passages. Dans le langage du métier, les spécialistes parlent de « transparence piscicole ».

Au centre du barrage, deux énormes clapets basculants (2,50 x 2,50 m) pourront être levés en cas de crue, libérant 55 m3/s chacun. L’idée est de laisser la rivière couler en mode torrentiel quand le débit devient « morphogène », c’est-à-dire quand le flux d’eau met les sédiments en mouvement, une valeur que les études ont évaluée à 100 m3/s. Voilà pour la transparence sédimentaire. Une maquette au treizième, installée dans un bassin, a permis de dimensionner ces équipements et est exposée au public. Les détails techniques sont décrits dans un article de Guéric Pérardel.

Avec quatre mètres, la hauteur de retenue d’eau est insuffisante pour alimenter les bouches d’alimentation du barrage. Des pompes remonteront donc l’eau dans un bassin, avant de la laisser couler vers l’usine de Monistrol. La production finale sera réduite, mais seulement de 15 %.

Cette réalisation unique (à commencer par la déconstruction de l’ouvrage précédent, une opération rarissime, qui est réalisée à l’explosif aux États-Unis) pourra servir d’exemple. En France, il existe 60.000 obstacles aux migrations des poissons migrateurs, dont 400 barrages et, depuis 1900, leur parcours linéaire exploitable s’est réduit de 70 % (voir cette vidéo). Le barrage de Poutès démontre qu’il est possible de réaliser des ouvrages qui conservent le profil naturel des cours d’eau et y préservent les activités humaines et biologiques.

Source : futura-sciences.com

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