Dans l'océan antarctique les icebergs géants sont des puits de carbone extrêmement efficace

Dans l'océan antarctique les icebergs géants sont des puits de carbone extrêmement efficace

L’activité du phytoplancton et les processus chimiques autour des très grands icebergs séquestrent efficacement le CO2 de l’atmosphère. L’effet était connu mais largement sous-estimé selon une équipe britannique.

L’absorption du dioxyde de carbone (le CO2) par l’océan se fait aussi par l’intermédiaire des organismes vivants. Le phytoplancton, des végétaux donc, le mobilise, comme le font toutes les plantes, pour construire leurs molécules organiques. Quand les eaux de surface de l’océan verdissent, c’est autant de carbone retiré à l’atmosphère, et ce pour une durée plus ou moins longue.

Les célèbres cocolithophoridés, de minuscules algues planctoniques, s’entourent d’une coquille appelée cocosphère, laquelle coule vers le fond à la mort de l’organisme, si celui-ci n’est pas avalé par les grands mangeurs de plancton. Cette pluie de matière carbonée sédimente et son effet n’est pas mince puisqu’au Crétacé, ces modestes organismes ont, de cette manière, fabriqué les falaises d’Étretat, y emprisonnant du carbone pour des dizaines ou centaines de millions d’années.

En Antarctique, le vêlage des grands glaciers entraîne de la matière organique et des minéraux continentaux, notamment du fer, qui constituent un bon engrais pour les végétaux planctoniques. L’effet est connu et des proliférations d’algues sont observées autour des langues glaciaires qui viennent fondre dans l’océan. Mais que se passe-t-il ensuite, et au-delà, quand cette masse de glace se brise en icebergs qui dérivent loin des terres ?

En 2007, le travail d’océanographes qui, depuis un navire, avaient étudié de près des icebergs avaient constaté que ces radeaux de glace embarquent des oiseaux en surface mais aussi, autour d’eux, un petit peuple aquatique, animaux et végétaux, qui ne quittent pas ce rivage dérivant. « L’océan austral manque de fleuves pour apporter en mer du matériel organique d’origine terrestre, expliquait alors Timothy Shaw, de l’université de Caroline du Sud. Les icebergs constituent une sorte d’estuaire mouvant distribuant des nutriments qui, dans d’autres océans du globe, sont apportés par les cours d’eau ».

La question était de quantifier cet effet. Une équipe du département de Géographie de l’université de Sheffield a pu le faire en étudiant 175 images saisies par des satellites entre 2003 et 2013 et montrant 17 grands icebergs de plus de 18 km de longueur détachés du continent antarctique.

Les icebergs géants sont des puits de carbone

La couleur de l’eau autour de ces blocs de glace permet de déterminer la production de chlorophylle et finalement d’estimer la production primaire de matière organique. Son ampleur semble avoir étonné les chercheurs, qui expliquent leurs résultats dans un communiqué, et les ont présentés dans un article scientifique publié dans la revue Nature Geoscience.

Autour de l’iceberg, la production de chlorophylle est augmentée jusqu’à une distance variant entre quatre et dix fois sa taille. C’est donc une tache verte d’au moins 80 km de rayon qui progresse ainsi vers les latitudes plus basses, alors que les plus vastes s’étalent sur des centaines de kilomètres. Dans une telle zone, l’absorption de carbone, est entre cinq et dix fois plus importante qu’alentour. Bilan global : ces icebergs géants seraient responsables d’un cinquième (20 %) de la séquestration totale de carbone de l’océan Antarctique, lequel représente 10 % de l’absorption de l’océan mondial.

S’il était connu, ce prélèvement supplémentaire de CO2 atmosphérique par l’eau de fonte des icebergs était tenu pour négligeable. Il faudra en tenir compte, expliquent les auteurs, qui précisent que cet effet n’existe que pour les plus grands d’entre eux. Si la fonte de l’inlandsis antarctique s’accélère, ce phénomène compensateur devrait donc être injecté dans les modèles climatiques.

Ce forçage venu du phytoplancton par ensemencement des océans avec des nutriments pour augmenter la production du phytoplancton est aussi une idée des adeptes de la géoingénierie qui veulent augmenter de cette manière la séquestration du carbone atmosphérique. La nature semble le faire déjà.

Source : futura-sciences.com

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